TITAUA PEU

En février et mars 2023 Rhizomes accueille Titaua Peu, écrivaine tahitienne dont nous aimons l’audace et les engagements littéraires et politiques.
A lire absolument, : Mutismes et Pina, publiés aux éditions Au Vent des îles. Deux romans qui font découvrir l’envers de la carte postale, avec une langue vigoureuse et sensible.

Née en 1975 en Nouvelle-Calédonie, Titaua Peu s’installe avec sa famille à Tahiti à l’age de deux ans. Après l’obtention du baccalauréat, elle part à Paris pour y poursuivre des études supérieures en philosophie, avant de revenir à Tahiti en 2002.
Auteure à l’engagement éminemment politique, Titaua Peu donne à voir une société polynésienne réaliste, loin des clichés illusoires. Elle représente une des principales voix francophones de la littérature du Pacifique.
Nous avons fait connaissance avec l’œuvre de Titaua par l’intermédiaire de Chantal T.Spitz, que nous avons accueilli en résidence en 2014. Depuis, nous avons continué à suivre son parcours. Malgré son refus d’assimilation et son côté inclassable, elle s’impose aujourd’hui définitivement comme auteure incontournable du paysage intellectuel et artistique polynésien.

"Je veux casser tous les mythes : celui de la Cythère, celui du polynésien enfant, celui d’un peuple bon. Mon écriture s’inspire d’abord d’un désir d’émancipation : politique, idéologique, anticolonialiste."

RENDEZ-VOUS AVEC TITAUA :

 mardi 7 février à 19h30 à la librairie de l’Angle Rouge à Douarnenez
 dimanche 26 février à 11h30 au café-librairie La Pluie d’été à Pont-Croix
 le jeudi 2 mars au lycée de Lesven à Brest (réservé aux élèves)
 le lundi 6 mars au lycée Jean-Marie Le Bris de Douarnenez (réservé aux élèves)
 le samedi 4 mars (à ne pas rater !!!) : séance Les Parleuses > Toni Morrison par Titaua Peu ! Atelier d’écriture, atelier de lecture par arpentage, performance inédite. Gratuit sur inscription obligatoire.
 le jeudi 9 mars à 20h45 : projection de "Les oubliés de l’atome" au cinéma Le Club
 le mardi 14 mars à 18h30 : rencontre au Local, rue S.Velly, sur la situation sociale en Polynésie aujourd’hui
 le vendredi 17 mars à 16h à la MJC Gradlon : atelier de cuisine, repas et discussion avec Titaua
 le lundi 20 mars soir : rencontre avec le Planning Familial de Douarnenez
 le samedi 25 mars : rencontre autour des littératures du Pacifique dans le cadre du temps fort Bresk !

BIBLIOGRAPHIE

Mutismes est son premier roman. Paru initialement en 2003, il fait d’elle la plus jeune auteure tahitienne à être publiée. Dès sa sortie, ce qu’elle décrit comme une « fiction », car « rien ne s’est passé et pourtant tout est vrai », fait scandale : ce texte est un véritable coup de poing contre l’establishment. La protagoniste raconte les drames qui bouleversent sa vie, depuis son enfance exposée à la violence du père, jusqu’à l’adolescence marquée par les départs et les arrachements. Dans une période où émergent les conséquences néfastes des tirs nucléaires, cette jeune fille doute de sa foi en l’humanité.
Sa rencontre avec Rori, activiste politique indépendantiste, parvient à lui redonner le sourire et à donner un sens à sa vie. Il lui faudra pourtant s’exiler en métropole, pour trouver la force de dire l’indicible, et de tenter de (ré)écrire l’histoire de son pays. Reprendre, en somme, la parole confisquée.

Avec Pina, son second roman, lauréat du Prix Eugène Dabit en 2017, Titaua Peu réalise un tour de force volontairement déterminé, salué par la critique, qui scelle son combat littéraire tout autant que social.
Ce livre « coup de poing » a comme protagoniste une jeune fille, noire de peau,
aux cheveux crépus (tout le contraire de la future vahiné des stéréotypes) qui connaît et qui raconte le mal de vivre d’une famille autochtone de la classe ouvrière, dominée au départ par un père alcoolique qui ne sait pas comment pourvoir aux besoins de sa femme et de ses neuf enfants. Toute la problématique de la dépossession coloniale est là : misère économique et spirituelle, logement inadéquat, manque de nourriture, violences arbitraires…
Si Mutismes a permis de lancer un défi à la vision idéaliste et finalement touristique qui perpétue la notion du paradis tropical, Pina, inspiré d’un fait réel, donne libre cours à la résistance par la représentation réaliste.

PROJET D’ÉCRITURE PAR TITAUA

"Si Mutismes et Pina sont des textes qui s’évertuent à dénoncer les maux dont souffre en silence une grande part des Polynésiens autochtones (dont plus de 52% vit sous le seuil de pauvreté), aujourd’hui, il m’est apparu nécessaire d’explorer d’autres genres littéraires, relever d’autres défis.
Ainsi, à mi-chemin entre le roman d’anticipation et le roman dit « social », mon nouveau projet littéraire intitulé « Disruptive » (titre provisoire) se propose d’imaginer comment sera la société tahitienne après un inimaginable bouleversement politique, lui-même issu de catastrophes dites climatiques. Résolument dystopique, ce projet imaginé sous forme d’une trilogie de romans est l’occasion de visiter le
passé du peuple ma’ohi : revoir ses origines, sa place dans l’Océanie, les différentes périodes de la colonisation et de la christianisation, réapprendre les figures de la résistance passée et s’interroger enfin sur le futur (notamment institutionnel) qu’elle pourrait (se) choisir. Le présent, la situation économique sociale et culturelle de la Polynésie n’échappent pas, cependant, au regard, parfois accusateur, mais le plus souvent réaliste et compatissant, que je porte sur mon pays.
Disruptive, au-delà de raconter une « autre » Polynésie, sera un roman sur les rencontres, la découverte de l’Autre, puisque les protagonistes sont issus des « quatre coins du monde ». Il s’agit également, pour l’auteure que je suis, d’alerter sur les dangers d’une culture et d’une pensée « standardisées » tahitienne, coupée des mouvements artistiques, voire des concepts philosophiques « exogènes » tant la tentation d’un repli et d’une certaine forme d’ethnocentrisme (relayée par les réseaux sociaux) me semble être devenue la règle. "

Pour retrouver le dossier complet de l’autrice :